Bien qu'interdits en France, les casinos en ligne, très addictifs, font de plus en plus d'adeptes.

Les pertes d'argent subies par les joueurs, souvent à peine majeurs, sont parfois colossales.

Le 20H de TF1 a mené l'enquête.

Poker, blackjack, roulette, machine à sous... Ces jeux d'argent sont accessibles 24h/24 et sans limite sur des plateformes de casinos en ligne. Avec près de 400.000 joueurs, ces sites n'ont jamais été aussi populaires. Ils sont pourtant illégaux en France, mais cela n'empêche pas les opérateurs d’attirer un public toujours plus nombreux. Malgré cette interdiction, les plateformes mettent tout en œuvre pour inciter les joueurs à miser sans retenue, entre promesses de gains fantastiques et bonus irrésistibles qui rendent la tentation encore plus forte.

Selon une étude réalisée en 2021 pour le compte de l’association Casinos de France et l’AFJEL, relayée par Les Échos, plus de mille plateformes de jeux d’argent en ligne seraient accessibles depuis la France, dont environ 200 permettant d'ouvrir un compte. Ce nombre croissant de sites en ligne représente un vrai défi pour les autorités, qui peinent à faire respecter la loi.

"Quand je recevais mes payes, je les perdais dans l'heure"

Certaines personnes, enfermées dans la spirale de jeu, subissent des pertes d'argent extraordinaires. Rencontre avec Adrien, un joueur que notre équipe a rencontré dans le reportage du 20H, qui s'est inscrit sur une plateforme de casino en ligne à 20 ans et qui confie avoir perdu entre 250.000 et 300.000 euros en l’espace de cinq années. "Aujourd'hui, je me retrouve avec rien", déplore-t-il, sans montrer son visage, en raison de la honte qu'il ressent. Ses relevés bancaires sont remplis de paiements quotidiens, chacun atteignant plusieurs centaines d’euros. Il a perdu tout contrôle et a désormais le statut d’interdit bancaire, cherchant refuge chez ses parents.

"Quand je recevais mes paies, je les perdais dans l'heure, et pas deux ou trois jours après", raconte le jeune homme, la voix remplie de tristesse. Il poursuit : "Parfois, je me dis : 'J'arrête de jouer', je posais mon téléphone, et une heure plus tard, j'étais de nouveau enfermé dans le jeu, en train de miser et d'espérer une chance qui ne viendrait jamais."

Illégaux sur le sol français, ces casinos en ligne trouvent des moyens de contourner la loi, s'appuyant sur des licences accordées à l'étranger. Par exemple, de nombreuses plateformes bénéficient d'une licence de jeu de Curaçao, un petit État autonome dans les Caraïbes. Cela facilite l'accès pour les joueurs, car l'inscription se fait sans vérification rigoureuse de l'âge. Il suffit de cocher une petite case affirmant que l'on a plus de 18 ans, une simple formalité qui ne décourage pas ceux qui tentent de contourner les règles.

Un grand succès auprès d'un public très jeune

Catherine Delorme, directrice CSAPA (Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie) et vice-présidente de l'association Fédération Addiction, rencontre chaque jour des joueurs compulsifs, de plus en plus jeunes. Elle remarque également une augmentation alarmante du nombre de patients endettés. "Lorsque vous vous rendez dans un casino traditionnel, l'expérience nécessite un certain engagement physique et temporel. Maintenant, avec les casinos en ligne, l'accès est permanent, disponible à toute heure, ce qui augmente significativement le risque de développer des comportements compulsifs," souligne-t-elle, ajoutant que "cela accentue les problèmes liés à la répétition excessive d'un comportement destructeur."

Le succès fulgurant de ces plateformes auprès des jeunes est en grande partie attribué à l'influence de certains joueurs qui partagent leurs expériences sur les réseaux sociaux. Ces influenceurs se filment pendant des heures, attirant des milliers de spectateurs, ce qui banalise le jeu d'argent. Bien que des messages de prévention soient souvent intégrés, comme par exemple "Ne jouez que ce que vous êtes prêts à perdre", ils sont rapidement éclipsés par les images de gains rapides et de succès extravagant, créant une perception déformée de la réalité.

Des joueurs rémunérés par les sites

De plus, l'illégalité du jeu en ligne n'est mentionnée que brièvement, souvent de manière désinvolte. "Vous n'avez pas le droit de jouer si vous habitez en France, mais si vous êtes en Norvège ou au Canada, tout va bien", explique un joueur sans hésiter. Nombre de ces influenceurs ont choisi de s'établir à Malte pour échapper à toute législation. Ils exhibent leur style de vie flashy sur les réseaux sociaux, entourés de voitures de luxe et de montres chères. Mais sont-ils réellement des joueurs comme les autres ?

TF1 a pu prendre contact avec l'un d'eux, un influenceur français qui avoue recevoir des compensations financières de la part des sites de casinos. "Je suis en partenariat avec eux. Les abonnés savent très bien comment cela fonctionne et connaissent mes gains. Ce que je sais, c'est que je respecte la loi, je suis basé à Malte, j'ai tous les papiers en règle, et je n'ai donc aucune crainte à avoir.", a-t-il déclaré.

Les casinos en ligne étant illégaux en France, les joueurs se retrouvent vulnérables face à des pratiques frauduleuses. Ils n'ont aucune garantie que les jeux ne soient pas truqués et ne peuvent pas être assurés de recevoir leurs gains. L'Autorité nationale des jeux, qui doit réguler ces activités, admet que les tentatives de fermeture des plateformes ou de poursuites judiciaires à l'encontre de ceux qui les promeuvent sont souvent vaines.

"Il n'est pas rare qu'un site fermé réémerge sous un nouveau nom de domaine peu après, et notre système judiciaire n'est pas suffisamment efficace pour traquer ceux qui opèrent dans l'illégalité," déclare Frédéric Guerchoun, directeur juridique de l'Autorité nationale des jeux. Il souligne que la promotion d'un site illégal en France peut entraîner des amendes pouvant atteindre 100.000 euros.

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